Il y a quelque temps, suite aux nombreux scandales perpétrés au sein de l’Église, il en est un qui nous (femmes de DJ) nous a particulièrement interpellées, celui des religieuses abusées et nous avons éprouvé le besoin de nous réunir pour en parler.
D’abord, cette incontournable et primordiale question :

« MAIS COMMENT EST-CE POSSIBLE ? »

Et nous avons tenté d’en faire le tour en prenant d’abord en compte la psychologie des jeunes religieuses : ignorance de la vie et des rapports hommes/femmes, isolement, manque d’estime de soi pour certaines, et pour toutes cette obligation de l’obéissance absolue, qui plus est face à des « représentants de Dieu », parfois brillants et dont nul ne pourrait remettre en cause la compétence et le charisme.
Alors qu’avons-nous en présence ? Une soumission totale face à un pouvoir incontesté, incontestable, donc sans limites. Et tout devient possible jusqu’à l’emprise. Pas de violence physique directe, mais une violence psychique, insinuante et graduelle avec l’équivoque d’un « mal dit »(par exemple, cet « amour d’amitié » pour qualifier, camoufler l’approche sexuelle) et la caution divine sur fond de spiritualité déviante (« ce que veut Jésus à travers le prêtre »).
Comme dans tout mouvement sectaire, l’emprise est telle que la victime ne la ressent pas comme telle. Il faudra du temps et un recul suffisant pour que « la mouche prise dans la toile d’araignée » retrouve sa liberté de penser.
Cas particuliers de victimes fragiles face à des prédateurs isolés ?
Que non ! Les faits se sont multipliés pendant des années et sur tous les continents. Il faut cadrer large : ces abus sont systémiques, liés à la structure même de l’Église, sa hiérarchie, ses interdits, son patriarcat, son célibat et surtout la sacralisation du prêtre dont l’impunité est assurée (au pire, une mutation). Système qui érige la domination ecclésiale en dogme tout puissant jusqu’à constituer, dans les pays d’Afrique, une forme de proxénétisme clérical (« trafic de faveurs » au Cameroun). On croit rêver… et le sommet de l’impensable est atteint quand l’une des victimes tombe enceinte : éjection de la fautive, avortement (dans la plus grande discrétion, évidemment).
Dans le fond, peut-on s’en étonner ? Le monde a toujours tourné ainsi.
Les abus de pouvoir masculins s’inscrivent dans la tradition historique et sociale de la servitude féminine (en raison de son « infériorité naturelle »). Une telle dissymétrie fait déjà le lit de toutes les oppressions. La prise de conscience d’une telle injustice n’est pas évidente pour tout le monde, elle se fait lentement et dans une certaine indolence. Il arrive cependant que de justes paroles – et c’est un vrai baume au coeur – se fassent entendre du côté masculin. Ainsi Pascal Hubert (dans Golias, mai 2018) :

« J’ai longtemps considéré la femme comme devant être au service de l’homme. C’était inscrit dans mon inconscient, dans mes croyances, dans l’air du temps. La femme ne pouvait être libre et disposer d’elle-même comme bon lui semble. Égale à l’homme en théorie, certes, mais non en pratique…
…Les textes religieux sont unanimes sur ce point. L’humanité est déchue par la faute de la femme tentatrice. J’ai longtemps cru en ces représentations… j’ai changé d’avis. Je ne pouvais plus endurer ces croyances sans vivre dans un profond mal-être. C’est en abandonnant la religion et ses « schèmes mentaux » que j’ai pu remettre en question ma manière de penser le monde en général et les femmes en particulier….
Quand j’y songe un instant, il est proprement effroyable de reléguer la moitié de l’humanité dans la servitude. C’est un scandale qui ne dit pas son nom, une oppression cachée et assumée par les hommes. Désormais conscient de cet intolérable « ordre naturel », je ne peux que souhaiter la femme libre, à l’égale de l’homme.

L’humanité s’est construite sur le modèle de la domination patriarcale. Et la religion est le fait de l’homme. Un puissant vecteur de soumission.

C’est une réalité : face à leur condition de perpétuelles servantes, les femmes doivent se rebeller. De cela, les hommes et les religions ne veulent évidemment pas.« 

Cette synthèse n’est pas exhaustive (au regard du foisonnement des impressions, réflexions, narrations personnelles suscitées par le sujet). Pour plus de clarté, j’ai choisi de l’inscrire dans le cadre annoncé au départ.

Madeleine

Sources :

Récit de Claire Maximova : « La tyrannie du silence » (édit. Futuropolis)
Documentaire :  « Religieuses abusées, l’autre scandale », diffusé en mars 2019 sur Arte (en particulier témoignage de Michèle-France)